Du Je au Nous : une écologie de la relation face à la crise du sens et du lien
- natachaaubugeau4
- 7 mai
- 4 min de lecture

Hier soir, nous étions 551:-) au Republic Corner à Poitiers, réunis autour d’un homme dont les mots résonnent avec une acuité rare dans notre époque troublée : Thomas d’Ansembourg, psychothérapeute. Invité par le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD), il nous a offert une conférence profonde, vibrante, engagée, sur les enjeux de notre manière d’être en relation. À partir de ses trois ouvrages clés – Cessez d’être gentil, soyez vrai, Du je au nous, et Notre façon d’être adulte fait-elle sens et envie pour les jeunes ? – il a déroulé une vision puissante, lucide et porteuse d’espoir.
Souffrance au travail : une alerte relationnelle
Dans un monde professionnel en tension, l’explosion des burn-out et du mal-être n’est pas un simple effet de surcharge. Elle est souvent le signe d’une perte de lien à soi-même, à ses besoins profonds, à son besoin d’authenticité, de reconnaissance, de sens. Thomas d’Ansembourg nous invite à reconsidérer cette souffrance non comme un symptôme individuel, mais comme une alerte collective sur nos modèles de fonctionnement.
Comme il l’a rappelé sur scène, on ne s’épuise pas à travailler trop, mais à devoir constamment faire semblant, à mettre un masque pour répondre à des injonctions de performance, de conformité ou de docilité. Dans Cessez d’être gentil, soyez vrai, il plaide pour une posture d’authenticité bienveillante, où l’on apprend à dire ce que l’on ressent, ce que l’on vit, ce que l’on attend – non pour imposer, mais pour co-construire. Cette parole vraie est un levier de vitalité autant que de responsabilité.
Du Je au Nous : une relation vivante, incarnée, co-responsable
La conférence a également permis de plonger dans l’un des enjeux majeurs de notre époque : la qualité du lien. Dans Du je au nous, d’Ansembourg développe une vision d’écologie relationnelle. Il ne s’agit pas simplement d’outiller les relations, mais de transformer notre posture intérieure : quitter la domination, la fuite ou la sur-adaptation pour entrer dans une relation vivante, fondée sur l’écoute véritable, la coopération, la responsabilité mutuelle.
Face à une société marquée par l’accélération, la fragmentation, la peur de l’autre, Thomas d’Ansembourg appelle à ralentir, à se relier, à désapprendre pour mieux apprendre à être avec. L’intelligence collective, dit-il, ne peut naître que de la paix intérieure et du courage d’être vrai.
Jeunes générations : des signaux forts que nous ne pouvons plus ignorer
Ce moment fort a aussi donné toute sa place aux jeunes. Car Notre façon d’être adulte fait-elle sens et envie pour les jeunes ? est bien plus qu’un titre provocateur : c’est une interpellation éthique.
Nous assistons à une montée alarmante du mal-être chez les adolescents et jeunes adultes : anxiété, désengagement, perte de repères, défiance envers les institutions. Et pour cause : quel modèle d’adulte leur offrons-nous ? Un modèle pressé, stressé, sur-adapté, qui court après des objectifs sans ancrage, des responsabilités sans cohérence ?
Thomas d’Ansembourg nous invite à regarder cette génération non comme "perdue", mais comme lucide. Les jeunes ne veulent plus faire semblant. Ils cherchent du vrai, du sens, du lien. Ils attendent de nous non pas des leçons de morale, mais une incarnation vivante de ce que nous prônons : cohérence, écoute, congruence.
Avancer avec courage… et parfois avec accompagnement
Mais ce chemin d’authenticité, de responsabilité et de transformation n’est pas toujours simple. Il vient souvent réveiller des blessures anciennes, des conditionnements profonds, des peurs tenaces. Oser sortir du masque, poser des limites, dire non, entrer dans une relation vraie… demande du courage, de la persévérance – et parfois un accompagnement bienveillant et structurant.
Être soutenu dans cette démarche par un coach, un thérapeute, un groupe de parole ou un collectif engagé, permet de ne pas avancer seul. Cela offre des espaces de recul, de réajustement, d’écoute profonde. Car comme le rappelle Thomas d’Ansembourg, ce que nous n’avons pas pacifié en nous, nous risquons de le projeter sur les autres. Se faire accompagner n’est pas un aveu de faiblesse, mais un choix de maturité : celui de se donner les moyens de vivre des relations plus vivantes et plus justes.
Un fil rouge : la soif de sens et de lien, à tous les âges de la vie
Ce qui relie le monde du travail en souffrance et la jeunesse en perte de repères, c’est la même blessure relationnelle. Une société qui valorise l’image au détriment de l’authenticité, l’ego au détriment de l’écoute, le contrôle au détriment de la coopération, ne peut qu’épuiser ses membres – qu’ils soient salariés ou adolescents.
Mais l’espoir est là. Dans chaque prise de conscience. Dans chaque "non" posé avec clarté. Dans chaque parent, manager, éducateur, citoyen qui décide de transformer sa posture plutôt que de reproduire les modèles dominants.
Ce que nous avons entendu hier soir : un appel au courage d’être
Être vrai, être en lien, être adulte autrement… Cela demande du travail intérieur, de la patience, des outils. Cela demande de sortir du mode automatique pour entrer dans un mode conscient. Mais cela ouvre des portes immenses : celles de relations plus profondes, de collectifs plus vivants, d’une société plus désirable.
Hier soir, à Poitiers, nous étions 551 à écouter ce message. À l’entendre. À le ressentir. À peut-être décider, pour nous-mêmes, pour nos équipes, pour nos enfants, de ne plus seulement faire, mais de commencer à Être. Ensemble.
Alors, Merci pour sa présence lumineuse et engagée. Merci pour ses mots justes, pour cette manière si humaine d’inviter chacun à se reconnecter à soi, à l’autre, au vivant. Merci pour son engagement à construire, depuis longtemps déjà, une société plus consciente, plus vivante, plus inspirante. Merci pour ce souffle, ce regard lucide, et cet appel au courage d’être vrai.
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